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Liens privilégiés avec une partie

Revue Experts numéro 44 | Paru le : 10.01.2010

" Par requête du 5 Décembre 1995, Monsieur X, mis en examen des chefs d'escroqueries et tentative d'escroqueries, a demandé en application des dispositions de l'article 175 et 174 alinéa 2 du Code de Procédure Pénale, à la chambre d'accusation de prononcer la nullité d'une expertise ordonnée par le magistrat instructeur et réalisée par Monsieur S.. A l'appui de sa demande, il fait valoir que Monsieur S., commis le 24 Janvier 1994 par le juge d'instruction aux fins de déterminer l'authenticité d'un tableau portant la signature "E. BOUDIN", avait été avant sa désignation consulté sur cette question par l'une des parties civiles, Madame Y. et par Monsieur Z. ainsi que cela ressortait d'un procès verbal de confrontation du 10 Novembre 1995, établi postérieurement au dépôt du rapport d'expertise notifié aux parties le 14 Septembre 1994. En réalité, il ressort seulement dudit procès-verbal que Madame Y. a indiqué avoir pris l'attache de Monsieur S. afin d'obtenir un certificat d'authenticité du tableau attribué à Eugène BOUDIN, mais que ce spécialiste lui avait répondu qu'il ne pouvait se prononcer au vu d'une simple photographie. Elle n'avait pas autrement insisté, et après avoir rencontré un membre de la famille du peintre qui avait écarté formellement la sincérité de la signature de l'œuvre, avait pu, par d'autres voies, avoir la confirmation que le tableau était faussement attribué à un célèbre auteur. Quant à Monsieur Z., il a pour sa part indiqué être allé voir Monsieur S. à PARIS en 1993, afin de s'enquérir des démarches que Madame Y. avait éventuellement faites auprès de lui pour identifier le tableau. Monsieur S. lui avait répondu qu'il n'avait pas été saisi de cette affaire. L'intéressé n'a toutefois pas versé au dossier, comme il l'avait annoncé, la correspondance que l'expert lui aurait adressée en ce sens. Ainsi il ne ressort nullement de ces déclarations que Monsieur S. ait, antérieurement à sa désignation par le magistrat instructeur, effectué à la demande des parties une étude du tableau litigieux, ni qu'il ait eu des liens privilégiés avec l'une ou l'autre des parties. Il n'apparaît ainsi pas que la réalisation de sa mission ait pu être influencée, ni qu'il ait pu conclure sans impartialité... PAR CES MOTIFS : Rejette... " Note : Contrairement au Code de Procédure Civile (article 234 NCPC) et au Code des Tribunaux Administratifs et des Cours Administratives d'Appel (article R.163, voir sur la question CAA NANTES, 2 Juillet 1997, Revue Experts n° 42 page 56 et nos observations et CAA LYON, 8 Juillet 1997, Revue Experts n°42 page 57 et nos observations), le Code de Procédure Pénale ne prévoit pas de possibilité de récusation de l'expert. Il n'en demeure pas moins que celui-ci, qui a prêté serment " d'apporter son concours à la justice en son honneur et en sa conscience ", est soumis, comme ses homologues civils et administratifs, à un devoir d'impartialité (voir sur la question nos observations sous chambre d'accusation AIX EN PROVENCE 1er Juillet 1998, Revue Experts n°42 page 58). Si des éléments de nature à mettre en doute cette impartialité ne sauraient permettre à la partie concernée de récuser le technicien choisi par le juge, ils peuvent être soulevés par elle après dépôt du rapport, à l'appui d'une demande en annulation de celui-ci. Ainsi une partie civile ne saurait-elle elle même désignée comme expert (Cass. Crim. 17 Octobre 1995, Droit Pénal 1996 Comm. 20 et 21 et nos observations). De même le fait pour un médecin, qui a initialement effectué une expertise, de représenter les intérêts d'une partie adverse lors d'une contre-expertise est de nature à nuire aux droits de la personne examinée et vicie dès lors la nouvelle expertise (Cass. Crim. 29 Mars 1979, Bull. Crim. n° 129). Dans l'arrêt rapporté, les éléments invoqués par la partie étaient par contre singulièrement inconsistants...

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