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Dissolution du BCA

Revue Experts numéro 71 | Paru le : 29.12.2009

L'espèce est juridiquement très technique. Nous essaierons de la présenter de façon simple en invitant les initiés à la lecture de la décision elle-même et de l'arrêt de cassation qui l'a précédée (13-11-2003). Depuis de nombreuses années, les compagnies d'assurances organisent certains de leurs rapports par voie de "conventions intercompagnie" auxquelles la plupart d'entre elles adhèrent. C'est dans ce cadre qu'en matière d'assurance automobile, elles avaient créé il y a de nombreuses années un GIE (Groupement d'intérêts économiques) destiné à regrouper les experts en matière de sinistre automobile. Ces experts spécifiques répondent eux-mêmes à une législation spécifique figurant au Code de la route. Ainsi, dès lors que l'une ou l'autre des compagnies fait appel à un expert relevant du BCA, les indications sur la valeur des réparations après sinistre ne pouvaient être contestées (rappelons aussi que ces experts qui ne dépendaient pas directement des compagnies d'assurances présentaient des garanties incontestables sur la qualité et l'objectivité de leur travail). Un carrossier manifestement mécontent de l'appréciation d'un expert BCA a entrepris de mettre en cause cet édifice et obtenu gain de cause après cassation. Il soutenait qu'il y avait un mélange des genres entre compagnies d'assurances et expertises techniques, la première activité étant incompatible avec la seconde (art. L. 326-6 du Code de la route). C'est en vain que le GIE invoque la directive 2002 / 92 / CE du Parlement européen (qui d'ailleurs ne peut en soi être analysée comme un élément de droit positif) alors que précisément cette directive, transposée en droit national français par la loi du 15-12-2005, ne considère pas que "l'activité consistant exclusivement en la gestion, l'estimation, ou la liquidation des sinistres" relève du domaine de l'assurance. Un GIE ne pouvant avoir qu'une activité "qui doit se rattacher à l'activité économique de ses membres", ne peut appréhender une activité dont la loi indique impérativement qu'elle est incompatible. En conséquence, sa nullité est prononcée, ce qui entraîne sa dissolution. Cet arrêt est très important et n'est pas contraire à la ligne éditoriale de la Revue Experts. Un expert doit être indépendant. Est-ce à dire qu'il ne peut pas avoir de lien économique avec l'une ou l'autre des parties ? Telle n'est pas notre opinion : expert privé, expert amiable, expert de compagnies d'assurances, comme l'expert judiciaire, ne trouveront leur "indépendance" que dans une éthique consacrant leur compétences techniques et leur objectivité. Comment assurer cette éthique autrement que par un serment ? Il ne s'agit pas d'éluder l'incompatibilité ou de la contourner mais de la rendre impossible de façon interne à l'expert par un principe d'honneur et de probité.

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